votre histoire
I don't even know myself at all
I thought I would be happy by now
The more I try to push it
I realize i gotta let go of control
Les paupières lourdes, la jeune adolescente regardait le paysage défiler sous ses yeux. Plus la voiture avançait, plus la verdure prenait une place prédominante dans le paysage qui s'imposait à elle.
"Ce déménagement nous fera du bien", ne cessait de dire sa maman, mais ce ne semblait pas être de l'avis de sa petite sœur, Eireann, qui lâcha un nouveau soupire, poussant Yuna à tourner son doux visage vers elle.
"On est bientôt arrivés ?", demanda alors sa cadette, attirant l'attention de leur mère, qui lisait un magasine à l'avant de la voiture.
"Oui, dans dix minutes, environ". Pourtant, la réponse ne sembla pas vraiment plaire à la jeune fille qui lâcha encore un soupire. Si Eireann était loin d'être heureuse de quitter leur Dublin natal, Yuna était assez indifférente à ce déménagement. Certes, Dublin allait lui manquer, tout comme ses copines de classe et ses petites habitudes, mais déménager avait ses bons côtés. Leur père serait plus présent et la famille allait vivre dans une grande maison, non loin de la mer, les conditions étaient loin d'être laborieuses. Seulement, Eireann ne voyait que les mauvais côtés, du moins, jusqu'au moment où leur père stoppa la voiture devant leur nouvelle maison. C'était grand... Peut-être un peu trop pour une famille seulement composée de quatre personnes, mais cela suffit à faire naître le premier sourire sur les lèvres de Eireann en deux semaines.
"Les gars, j'vous présente Yuna, elle est nouvelle. Yuna, voici Erwan, Roman et Noah, mon frère". Timidement, l'adolescente lâcha un petit sourire, avant de poser son plateau repas à côté de Mia et de s'installer sur la chaise.
"Salut", lâcha-t-elle doucement, récoltant les sourires des trois jeunes adolescents, déjà assis depuis de nombreuses minutes. Ils étaient un petit peu plus vieux qu'elle, tout comme Mia d'ailleurs, qui n'avait pourtant pas hésité à l'approcher, alors qu'elle était complètement perdue dans les couloirs de l'école, la sauvant de quelques minutes de battements qui lui aurait donné mauvaise figure dès son premier jour de classe. Rapidement, la conversation s'engagea assez naturellement, et la jeune Yuna fut immédiatement mise à l'aise. Ces gens là étaient vraiment adorables. Et dire qu'en arrivant ce matin là devant les portes de l'établissement scolaire, elle s'était mise à trembler de peur à l'idée de ne pas être acceptée ! Ses craintes étaient désormais loin derrière elle alors que le groupe d'amis l’assommait de questions en tous genres sur sa vie, son passé et ses pensées sur sa nouvelle vie.
A peine eut-elle le temps d'ouvrir la porte que des cris se firent entendre par dessus la musique qui tournait à fond dans la colocation. Surprise, l'étudiante entra dans l'appartement, croisant des visages qu'elle ne connaissait absolument pas. Il y avait du monde, beaucoup de monde et lorsqu'elle entra dans le salon, son souffle se coupa à la vue du bordel qui régnait en maître.
"YUNAAA !!", entendit-elle à sa droite. Elle n'eut pas le temps de réagir que Noah la prenait dans ses bras, décollant son frêle corps du sol. Il avait bu, elle l'entendait à sa voix un peu plus aigue que d'ordinaire. Finalement, il la relâcha, rieur.
"T'es enfin rentrée !!", lâcha-t-il en criant un peu pour qu'elle puisse l'entendre par dessus la musique. Abattue la jeune étudiante lâcha son sac à terre et haussa légèrement les épaules. Contrairement à ses amis, elle avait eu cours ce soir là et si Erwan l'avait prévenu qu'ils comptaient inviter deux ou trois amis pour passer la soirée, elle ne s'était certainement pas attendue à voir débarquer une quarantaine de personnes dans leur colocation.
"T'étais où, heiiiin ?!". Noah était définitivement bien trop bourré et si son comportement avait parfois tendance à l'agacer, cette fois-ci, elle laissa un léger rire s'échapper d'entres ses lèvres.
"En cours, idiot", lâcha-t-elle en riant alors qu'Erwan arrivait à son tour, accompagné de Mia, tous les deux apparemment aussi saoulent que Noah. Cela suffit à la faire rire, du moins, jusqu'au moment où Elizabeth débarqua à son tour, attrapant Noah par la nuque pour venir poser ses lèvres pulpeuses sur les siennes. Cette simple vision suffit à lui briser un petit peu plus le cœur et à lui faire détourner son regard.
"Bon alors, y a quoi à boire ?".
Installée sur le canapé, Yuna profitait du calme matinal pour réviser un peu. Enfin, c'est ce qu'elle croyait...
"Coucou". Son regard se leva de son code civil pour se poser sur... Noah, torse nu, à moitié réveillé. Il s'affala sur le canapé, juste à côté d'elle alors qu'elle tentait de se concentrer sur son travail.
"ça va ?", demanda-t-il, la voix encore un peu roque.
"Ouais ouais", récolta-t-il comme simple réponse, avant que quelques autres secondes ne défilent.
"bien dormi ?", tenta-t-il, ne récoltant qu'une seule et même réponse.
"Ouais ouais"... Étonné, Noah se redressa un peu, les sourcils froncés.
"Tu fais la tronche ?". Yuna écrivit quelques mots sur sa feuille de révision, en haussant légèrement les épaules.
"Non", lâcha-t-elle froidement.
"Si, tu fais la gueule !". Il la connaissait par cœur... Elle avait beau vouloir le cacher, il avait raison, elle faisait la tronche. A vrai dire, Yuna ne savait pas vraiment pourquoi le voir en couple avec Elizabeth la dérangeait autant. Ces deux là étaient ensemble depuis le lycée, ce n'était pas nouveau et pourtant, malgré les années qui passaient, elle avait toujours autant de mal à les voir heureux ensemble et amoureux.
"Qu'est-ce qu'il y a ?", demanda-t-il alors, se rapprochant de la jeune femme et venant poser son menton sur le bord de son épaule... Geste qu'elle rejeta d'un haussement.
"Rien, je révise", répondit-elle, les yeux rivés sur ses cours.
"Dis moi", insista-t-il, ce qui eut le don d'énerver l'asiatique.
"Y a rien, je révise, j'te dis !", mais cela ne sembla pas suffire au jeune homme, qui poussa un peu Yuna.
"Yuyuuuu", chanta Noah, venant glisser ses mains sur ses hanches pour les lui pincer.
"Commence pas !", tenta-t-elle, mais c'était trop tard, Noah était parti pour la faire craquer. Rapidement, il se mit à la chatouiller, lui faisait lâcher de nombreux rires qui attirèrent immédiatement Erwan qui ne se priva pas pour se joindre à son ami. Décidément, elle ne pouvait pas lui faire la gueule bien longtemps.
L'appartement sentait le renfermé. Les lumières étaient éteintes et lorsque Yuna appuya sur interrupteur du salon, elle entendit un râlement. Il n'était pas étonnant pour elle de découvrir l'appartement de Erwan dans un tel état... Encore moins de voir ce dernier affalé dans son canapé, le teint blanchâtre.
"Tu veux quoi ?". Il ne semblait pas ravi de la voir et elle savait que s'il se donnait vraiment la peine, il aurait planqué la clef cachée sous le pot de fleur devant la porte de son appartement ailleurs pour l'empêcher de venir. Mais Erwan était dans un état si pitoyable que même ce simple geste semblait impossible pour lui.
"J'viens voir si t'es pas mort", lâcha-t-elle, ramassant quelques vêtements qui traînaient par terre, les posant sur le bord du canapé. Ça lui brisait le cœur de voir Erwan ainsi. Depuis la mort de Noah, il s'enfonçait dans une solitude qui faisait peur à voir.
"c'est bon, j'suis vivant, tu peux partir, maintenant". Ses paroles étaient froides, tranchantes et Yuna sentit un pincement au niveau de son cœur, qu'elle cacha avec force. Elle se devait d'être là, de ne pas sombrer, pour lui, pour elle, pour le groupe. Depuis la mort de Noah, leur amitié partait en flambeau et elle savait que son défunt ami n'aurait jamais voulu voir ça, encore moins l'état pitoyable de Erwan.
"T'as pas mangé depuis combien de temps ?", demanda-t-elle en voyant l'état de son ami... Il soupira et ne prit même pas la peine de lui répondre. C'était peut-être mieux ainsi, plus supportable que ces paroles acerbes avec lesquelles il lui parlait.
"Bon appétit !". D'une même voix, les deux jeunes femmes répondirent au beau Elias, qui retrouva rapidement son bureau, à l'autre bout du couloir.
"C'est qui ?", demanda Mia, le sourire jusqu'aux oreilles. Yuna planta sa fourchette dans une feuille de salade et la porta à sa bouche avant de répondre.
"Elias, il travaille au service informatique.", répondit-elle simplement, savourant son repas de midi. Il n'était pas rare que Mia la rejoigne à son bureau pour qu'elles mangent ensemble. C'était toujours agréable de passer du temps avec son amie, même si lorsque le sujet en venait à Noah ou même Erwan, tout semblait tout de suite moins facile.
"Il est mignon". Étonnée, Yuna lança un regard curieux à son amie. Elle n'avait pas tord, Elias était vraiment mignon, mais il était un collègue de travail, elle n'avait jamais rien envisagé de plus avec lui.
"J'crois que tu lui plais", déclara une nouvelle fois Mia, faisant pouffer de rire Yuna.
"N'importe quoi". Pourtant, Mia ne semblait pas du même avis. "
Oh ça va, me dis pas que t'as pas remarqué les petits regards qu'il te lance, et puis le "bon appétit", la façon dont il l'a dit !". Une fois de plus, Yuna se mit à rire, ne croyant pas du tout son amie.
"Il est poli, c'est tout !", et puis, de toute façon, elle ne connaissait pratiquement pas Elias. Il était arrivé dans l'entreprise deux mois plus tôt et elle n'avait pas vraiment eu le loisir de véritablement discuter avec lui.
"T'es vraiment aveugle, ma parole !".
Il pleuvait des cordes ce soir là. La route était glissante et sa conduite peut-être un petit peu trop rapide. Son cœur tambourinait dans ses oreilles et les larmes coulaient sur ses joues froides. C'en était trop. Pour la première fois, elle craquait. Noah était mort de longs mois auparavant et pourtant, ce n'était que maintenant qu'elle prenait vraiment conscience des choses. Elle l'avait aimé. Aimé si fort et si longtemps qu'elle avait fini par enfouir tous ces sentiments au fond d'elle-même. Pourtant, ce soir là, ils lui explosaient à la figure comme une bombe. Elle avait perdu l'homme qu'elle aimait et jamais plus elle ne le reverrait. D'un mouvement maladroit, elle stoppa sa voiture en bas de l'immeuble où elle travaillait, prenant quelques secondes pour reprendre son souffle. Elle n'avait jamais craqué, pas une fois, c'était la première fois, elle avait le droit, non ? Finalement, après avoir soufflé, elle sortit de la voiture, trottinant jusqu'à l'entrée du bâtiment pour se mettre au plus vite à l'abris. Ce fut un réel échec puisque lorsqu'elle arriva dans l'entrée, elle était complètement trempée, ses cheveux se plaquant sur son visage rosi par le froid de janvier. Les bureaux étaient éteints, la grande majorité des employés étaient chez eux et lorsqu'elle arriva au troisième étage et s'engagea dans le couloir menant à son bureau, elle fut étonnée de découvrir le visage d'Elias.
"Yuna ? Qu'est-ce que vous faites là ?". Il semblait aussi surpris qu'elle et avait de bonnes raisons, puisqu'elle avait terminé son travail depuis cinq bonnes heures.
"J'ai euh", commença-t-elle, la voix brisée par les quelques larmes lâchée plus tôt.
"J'ai oublié mon téléphone dans mon bureau.". Cela sembla suffire au jeune homme.
"Et vous ?". Il ne mit pas plus de deux secondes pour lui répondre. "
On a eu un problème informatique en fin d'après-midi, j'suis encore en train d'essayer de le régler". Pour simple réponse, Yuna hocha simplement la tête. Au moins, il était investi dans son travail, c'était déjà ça. Elle commença alors à tourner les talons pour rejoindre son bureau et retrouver son téléphone lorsqu'Elias l’interpella.
"Vous... vous allez bien ?". Il avait surement remarqué ses yeux un peu rougis et son air de déterrée.
"Ou... oui, merci...". Ils étaient là, l'un en face de l'autre, probablement seuls pour la toute première fois... Et sans comprendre comment, ni pourquoi, Yuna fut prise d'une brutale envie et ses lèvres se retrouvèrent brusquement plaquées contre celle du jeune informaticien qui la guida vers un coin sombre de son bureau.