Depuis le retour des enfants disparus, les douleurs refont surface, elles se font plus vives et prenantes. Le maire de la ville a décidé de faire un hommage, de faire une soirée en l'honneur de ceux qui ne sont pas revenus, ceux qui sont restés derrière. Un rappel aux morts, les âmes en peine.
Des tables éparpillées dans une salle du château du village, les discours de quelques personnes qui tentent de reprendre leur vie en main. Le maire incite les anciens enlevés à venir malgré leur réticence. Kelaan, lui, doit parler devant tout le monde, il refuse. Aucune envie de s'afficher, mais on lui force la main, à lui et eux autres. Un peu de baume sur la ville, un peu de courage pour tenter de changer le destin, changer le futur.

La musique. Les tables parfaitement placées et un stage en avant avec un micro pour les discours qui auront lieu au cours de la soirée. Le blanc. Trop de blanc. Trop de temps pour placer le moindre détail et un buffet immense à perte de vue. Trop d’argent dépensé dans cette soirée, trop d’argent lancé dans le vide. C’est important. Ceux qui restent derrière. Ceux qui ne sont pas revenus dans cet enfer. L'ambiance calme. Ça pour sauver la ville. Ça pour les familles.

○ Un seul post par personne pour parler de votre entrée, de ce que vous pensez de l'endroit et de la soirée.
○ veillez privilégier les posts courts.
○ Vos équipes vous seront envoyées par MP quand tout les participants auront postés dans le sujet commun pour parler de leur première impression et suite au discours de Kelaan.

C'est en compagnie de son père que Siobhàn passe les portes du château à l'entrée de la ville, réquisitionné pour l'occasion. Instinctivement, le regard de la brune balaie la salle du regard à la recherche d'Eoghan sans parvenir à le trouver. Ce qu'elle remarque néanmoins, c'est que rien n'a été laissé au hasard. Le maire semble décidé à faire de cette soirée quelque chose qui marquera les mémoires, sans doute pour faire oublier l'incompétence des forces de l'ordre locales durant toutes ces années où ceux que l'on appelle encore les enfants disparus, ont été laissés aux mains d'un malade. Elle se demande ce qu'ils peuvent ressentir devant tout ça, eux , qui ne sont plus disparus, et encore moins des enfants. Elle s'imagine à leur place quelques instants, sans être capable pour autant ne serait-ce que de frôler du bout des doigts la détresse qui a dû être la leur durant toutes ces années. A leur place, elle aurait simplement envie de hurler. Elle sursaute lorsque la main de son père se pose dans son dos pour l'inciter à avancer. Elle reprend ses esprits et lui adresse un signe de tête tandis qu'ils s'éloignent de l'entrée pour se fondre dans la foule des habitants qui sont venus en masse commémorer les morts et saluer le retour des survivants.

Laissez ces pauvres gosses vivre au lieu de remuer le couteau dans la plaie. = ma réaction quand j'ai appris que le maire voulait tenir cette soirée dédiée à ceux qui n'étaient pas revenus. Attention, je n'ai rien contre honorer la mémoire de ces personnes, mais j'ai aussi entendu plus tôt qu'un des survivant allait devoir parler devant tout le monde, et ça m'a rendu mal pour lui. Merde, c'est pas une bête de foire non plus, il a pas besoin qu'une foule ahurie le fixe pendant qu'il parle de l'expérience la plus traumatisante de sa vie. Non parce qu'on va pas se mentir non plus : qui de ceux présent à cette soirée ont vraiment envie d'être là ? Pour la plupart, c'est juste pour faire bonne figure. Qu'est-ce que je fais ici moi ? Eh bien pour une fois, je ne suis pas différent de « la plupart », et je suis là parce que c'est une forme de respect, et parce que si un gosse doit parler, faut bien qu'il y ait des gens pour l'écouter. -et parce qu'il y a un buffet.-
J'ai pas envie de cracher sur la charité, mais tout dans cette salle semble bien trop grandiloquent et exagéré pour ce que c'est. On est ici pour payer nos hommages, c'est pas censé être une foutue soirée mondaine. J'aperçois des individus à part et je devine qu'il s'agit des quelques survivants qui ont trouvé le courage de venir. Ils ont l'air clairement mal à l'aise. Pauvre gosses.
Stella n'est pas loin de moi, et ensemble, nous nous faufilons entre les gens bien habillés -moi, j'ai juste fait l'effort de mettre une chemise, j'aime pas les costumes-, un goût amer dans la bouche. Certes, c'est une bonne intention, et je me montrerais sûrement moins cynique si tout ne me donnait pas l'impression de faire parti d'une immense mascarade.

Saíréann s'est crispée lorsqu'on lui a dit qu'ils étaient tous obligés de se rendre à cette soirée. Ne peuvent-ils pas comprendre que les bains de foule ne sont pas ce qu'il y a de mieux pour eux ? Du moins, c'est le cas pour elle. Aucune envie de voir tous ces gens, de sentir leurs regards bruler son visage ou même d'écouter leurs voix mielleuses leur dire à quel point ils ont été courageux. Mais le pire pour Saíréann est de voir son frère. Depuis leur sortie, ils ne se sont pas adressé une seule fois la parole, ni même revus. Jamais elle n'a passé autant de temps sans lui depuis leur rencontre et ça la tue.
Passer les portes de cette grande salle lui serre le coeur. Saíréann n'avait qu'une envie, partir. Ses parents près d'elle, son regard scrute la pièce espérant apercevoir la tignasse brune de Kelaan. Elle sait qu'il doit parler ce soir. Comment poser des mots sur ce qu'ils ont vécu ? Pourquoi en parler et remuer le couteau dans la plaie. Elle est en vie oui, mais elle ne sait pas si elle est heureuse de l'être.

Mon regard se promène sur l'assemblée depuis le buffet que je termine d'aider à mettre en place. Lorsque j'ai entendu parler de l'événement, je me suis douté que la plupart des habitants viendraient, que ce soit pour réellement honorer la mémoire des disparus ou par simple curiosité morbide. Je ne me suis pas trompé. La salle est comble et le pompier en moi ne peut s'empêcher de se demander comment évacuer toute cette foule, au cas où quelque chose tourne mal... Je me suis rassuré en jetant un coup d'oeil aux issues de secours et aux extincteurs répartis un peu partout dans le château. N'empêche, je ne peux pas m'empêcher d'appréhender et d'imaginer le pire...
Mais peut-être que ça n'a rien à voir avec les événements actuels au final et que cette sensation désagréable que j'éprouve  depuis ce matin n'est liée qu'à ma propre histoire. Cet hommage fait forcement écho à celui qui a été rendu à mes camarades, tombés sous les balles de mon frère il y a plus de quinze ans de ça. Évidemment, en tant que frère du meurtrier, je n'avais pas eu le droit de m'y rendre. Ils avaient choisi d'oublier que j'étais aussi le fils, le frère, le meilleur ami et le petit ami de certaines des victimes et que j'étais de ce fait sans doute le plus concerné par toute cette tragédie... Je n'avais même pas eu le force de leur en vouloir à l'époque, mais aujourd'hui, alors que j'assiste à cet hommage-ci, je reviens malgré moi sur mon jugement. J'aurai eu besoin de ça, de ce moment de communion, de sentir ma peine partagée par des tas d'autres, anonymes ou personnes plus proches. Ils m'avaient dépossédé de ce droit par rancoeur et bêtise et j'en payais encore le prix aujourd'hui. Cependant, il me suffit de jeter un coup d'oeil en direction des rescapés (que le maire a invité à prendre la parole au cours de la soirée) pour remettre cette hypothèse en doute. Ils donnent surtout l'impression d'avoir envie de fuir... Il faut dire qu'en voulant mettre les bouchées doubles pour rendre l'événement le plus marquant possible, le maire de Youghal donne surtout l'impression d'avoir voulu épater la galerie. Peut-être pour compenser son inefficacité dans cette histoire ? Parce que si j'ai bien compris, les rescapés se sont enfuis et n'ont pas été sauvés par les autorités locales.
Mais je suis interrompu dans les réflexions par une personne qui s'approche du buffet près duquel je me tiens, en tenue de service. Je m'affuble d'un sourire poli et me mets à disposition de l'habitant. Quelque chose me dit que le buffet ne va pas tellement se vider et que les gens ne sont pas venus manger. Qui pourrait bien avoir de l'appétit ?

J'ai l'air d'un joli pêché posé sur des talons aiguilles, dans ma petite robe des grandes occasions. Mon maquillage est on fleek – merci tutorial youtube fait par une drag queen - et mes cheveux sont ramenés dans un chignon nonchalant. J'ai l'air d'une vraie lady, Kate Middleton peut aller se cacher. Tout ça pour une réception en l'honneur des victimes du méchant monsieur de Youghal  - Félicitation, vous vous êtes fait kidnappé! –  à laquelle je n'ai pas trop envie d’assister, pour être totalement honnête. Moi et les cocktails, ça fait deux - Je préfère les after parties – mais on m'a dit qu'il y aurait des canapés, un buffet, et j'aime la bouffe gratuite, surtout quand elle est servie par des gens avec des cravates.

Je suis donc sortie du garage, habillée comme une véritable princesse, pour manger crevettes et autre petites bouchées qu'on ne retrouve jamais dans le frigo des Crossgroves – On est plutôt genre céréales de marques génériques et spaghettios de marques encore plus génériques. Steeve, lui aussi attiré par la rumeur de nourriture gratis m'accompagne, en bon oncle / bff  qu'il est.

Je dois m'avouer un peu déçue quand j'arrive au « chateau ». J'imaginais une table sans fin, comme dans le labyrinthe de Pan – une montagne de raisins, des pinces de crabe partout, des fleurs comestibles, mais surtout, une dame couchée sur une table avec des sushis sur le corps. Au moins, il y a des crevettes sur des petits craquelins salés. J'en vole un à un serveur qui passe près, et contemple l'idée de l'avaler tout rond un moment, avant d'oublier ça. C'est ma première crevette ever, je dois la déguster, comme une dame.

Délicatement, alors, je croque la crevette, oubliant bien vite la fête, la raison pour la quelle je suis ici. Tout ce qui compte, c'est moi, et ce petit fruit de mer.

oh. oh. Ooooh?

Elle ne sait pas vraiment pourquoi elle est là, pourquoi elle participe à tout ça. Ils sont de retour, c'est presque irréel. Le voir, à été un choc pour la blonde, le revoir, vivant. Bien en cher et os, elle c'était assurée que ce n'était pas son cerveau qui lui jouait un sale tour. Il n'avait pratiquement pas changé, les photos, c'était lui, mais plus vieux, plus abimé, par toute ses années enfermé. Sa première réaction fut la joie de pouvoir le revoir, son frère, celui qui lui avait toujours manqué, mais elle avait trop de questionnement pour faire une fête. Une ombre au tableau, celui qui avait enfermé des enfants devait toujours être là, personne n'avait encore été arrêté. Elle a bien essayer de questionner son frère, mais elle n'avait pas tellement envie de le brutalisé. Il avait du vivre l'horreur. Ils avaient du tous vivres l'horreur. En tout cas en entrant dans la salle, elle remarqua quelques regard qui la fixait. Les gens de la ville n'allez donc pas arrêter de la fixé, avant c'était pour le fait qu'il est disparut maintenant c'était pour la réapparition miracle de son frère. Elle poussa un soupir, elle ne savait vraiment pourquoi elle était venue, assister à cette fête. Aisling, regarda autour d'elle, la salle, en tout cas, ils avaient fait ça bien. De belle table, un beau buffet remplit de nourriture. Pensez-t-il vraiment que tout ça allait tout effacer ? Que tout le monde allait reprendre sa petite vie tel qu'ils l'avaient laissés il y a maintenant seize ans pour les Doyle. Elle chercha des yeux, un sourire amicale ou même un regard, même si elle n'avait pas spécialement envie de partager son point de vue sur le retour inespérée de son grand frère. Son frère, elle n'avait qu'une crainte, qu'on lui reprenne de nouveau.

Eoghan arrive sur les lieux affublé d'un jean, de pompes blanches et d'un gilet basique. Il n'a fait aucun effort vestimentaire pour ce qu'il considère être une grosse supercherie. Il n'avait aucune envie de venir aujourd'hui et si les autorités parentales n'avaient pas lourdement insisté, il aurait rapidement abandonné l'idée. Là, il n'avait pas vraiment eu le choix et franchement, ce n'est pas pour lui que le pire est à venir. Il avait croisé le regard inquiet de sa sœur dans la voiture et s'était trouvé bien démuni, ne sachant que faire pour la rassurer. Le lieux sont décorés sobrement, il s'était attendu à beaucoup plus de fioritures. Il détourne instinctivement le regard lorsqu'il aperçoit Siobhàn, la situation est gênante depuis quelques jours, il n'a pas besoin de plus de drame aujourd'hui. « Je vais au buffet. » fit il pour se détacher de l'emprise parentale. Il avance vers la bouffe, pour plus de crédibilité, il n'a pourtant absolument pas faim. Son regard croise celui d'Aisling avec qui il s'est rapproché quelques jours plus tôt même s'il a le sentiments que leurs conversation a eu lieu à une autre époque. Tout est si... différent depuis leurs retours. Pris dans ses pensées, il bouscule une jeune femme par mégarde. « Je suis dé... » commence t-il alors qu'il reconnait la jolie Stella. « Oh c'est toi. » termine t-il finalement. Une histoire qui remonte à un an plus tôt, une soirée arrosée, un jeu de la bouteille et pouf le voilà qui perd sa virginité avec la plus grande nymphomane de toute l'histoire de Youghal.

On m'a vaguement parlé de ces enlèvements. Je n'en sais presque rien. Juste que les enlevés ont été très touchés. C'est pour eux que je suis là. Je ne connaît personne parmi les enlevés, du moins, pas personnellement. Je me dis que j'y vais pour ceux qui n'ont pas eu la chance de revenir, et aussi pour ceux qui doivent être très touchés pas ces enlèvements. Je passe les portes, aperçois quelques visages vaguement familiers. Ne sachant pas où me mettre, je décide d'aller au buffet, déjà sérieusement encerclé. Ils sont tous bien habillés, bien coiffés, bien maquillés. Je vois Stella de l'autre côté de la table, et aussi Oswald. Mais ils sont trop loins et je suis du mauvais côté. Une pancarte affiche Bienvenue. Je détourne les yeux, mais je n'ai pas faim. L'évènement m'a coupé l'appétit. Je me retourne et attends sur un banc, l'esprit perdu. Un discours sera prononcé, apparemment. Donc, il suffit d'attendre patiemment.

Cet évènement, c'est avec réticence que j'avais décidé de m'y rendre. Revoir les autres kidnappés, être dévisagé le temps d'une soirée, je n'aimais pas ça. Mais après tout, peut importe. J'étais directement concerné, et je me devais d'y aller. Je m'étais préparé pour partir vers l'évènement, seule, sans savoir vraiment à quoi m'attendre. J'avais enfilé une robe orange, qui appartenait à ma mère, et m'était coiffé très simplement. Après tout pourquoi me faire jolie pour une soirée pareille.

J'arrive au alentours de dix-neuf heures, et j'aperçois rapidement les anciens kidnappés. Saíréann. Et les autres. Je m'approche du buffet, n'osant parler à personne, bien trop gênée, et surtout pas prête pour cela. Je reste ici, seule en attendant quelque chose qui puisse me faire sortir de là. Un discours est prévu de la part d'un des kidnappés. Celui qui nous a trahit, mais qui nous a sauvé. J'essaie de ne plus y penser, et j'attends. J'attends.